En 2020, yves marie bellot nous gratifiait d’un premier album ô combien convaincant, Grand Plongeoir.
Quatre ans plus tard, l’auteur-compositeur-interprète revient avec une œuvre forte : un concept album intitulé corps silex. Derrière ce titre mystérieux se profile un disque en forme d’histoire d’amour, composé de onze chansons racontant les affres et les joies d’une relation amoureuse. Comme sur son précédent opus, yves marie bellot fait preuve d’une grande qualité tant dans l’écriture de ses chansons que dans leur composition et leurs arrangements, qui convoquent autant l’épure que le foisonnement.
« Le problème » plante le décor tout en nous présentant le personnage avant la rencontre, mêlant un humour caustique à un constat sociétal subtil au regard de nos comportements liés au virtuel. « Les gens s’aiment à coups de pouces en l’air », chante le musicien, avant une conclusion épique qui nous confirme que le disque prend de nouvelles directions sonores plus ambitieuses mais toujours aussi maitrisées.
« Joli songe » nous plonge ensuite dans le vif du sujet, avec cette double voix évoquant le couple et ses possibilités, ses attentes et ses frustrations.
« Nos plus beaux souvenirs » dit la nostalgie en spoken word, tout comme sur le troublant « Des nœuds » : un parfait mélange de la douceur d’un Albin de la Simone mélangé à la poésie malicieuse d’un Ben Mazué. Ici, une finesse douce-amère se balade sur ce piano chaud et mélancolique. « Ils sont à venir, nos plus beaux souvenirs » : comme une décomposition du passé, du présent et du futur, comme l’amour qui brouille les pistes et distribue les cartes au gré des humeurs. Les ambiances musicales diverses, parfois pop, parfois proche de certains B.O. de films, suscitent des images mentales encore plus fortes que sur le disque précédent.
Le musicien sait toujours aussi bien nous happer avec des mélodies qui se plantent dans le cœur, comme sur le magnifique arpège de « Sans peine, pas de victoire », un morceau tout en dentelle, qui ressemble à une célébration de l’attente, de l’effort dans la relation à l’autre et à soi.
Il nous surprend encore en s’ouvrant à de nouvelles rythmiques comme sur l’enlevé « Julie », qui nous donne envie de danser sur des riffs de guitare étouffés. Jolie respiration, aussi gracile que solide.
Enfin, les chansons qui viennent clore l’album, « Ce que je perds » et « Après l’orage », disent à merveille les sentiments contradictoires de la fin d’une relation, ou comment se rappeler de la vie d’avant, qu’elle a été possible, tout en se projetant dans un futur qui semble improbable, comme un corps silex qui se trouverait en panne d’étincelle.
Toujours est-il que la flamme, elle, brûle toujours dans l’œuvre d’yves marie bellot.
Arnaud de Vaubicourt